Nombre de SSII ont pour principale activité d’envoyer chez des clients des techniciens ou ingénieurs
chargés d’effectuer un certain nombre de prestations sur le système informatique de leurs clients.
Il s’agit en général de réaliser pour de tierces personnes des études techniques spécialisées ou non. Si la relation de travail se déroule pour la plupart du temps sans problème, la situation devient délicate quand le salarié se retrouve en période d’intercontrat. Il est intéressant de revenir sur la spécificité de cette situation, les droits et obligations de chaque partie et les règles relatives au licenciement.
Les règles applicables sont celles relatives au droit du travail et la convention collective applicable est la convention collective nationale bureaux d’études techniques, Cabinets d’ingénieurs conseils et les sociétés de conseils dite convention SYNTEC.
– SSII: Les obligations résultant de la période d’intercontrat
– Une situation de fait
L’intercontrat n’est pas une notion juridique. Il ne fait l’objet d’aucune réglementation légale ou conventionnelle. C’est une situation de fait. Il est défini comme la période de latence entre deux prestations techniques chez un client. Pendant cette période, le salarié est en instance d’affectation chez un autre client. Le salarié n’est donc pas en mission. Mais l’employeur a un certain nombre d’obligations à l’égard du salarié.
– Les obligations de l’employeur et du salarié
L’employeur doit proposer un travail en interne au salarié en adéquation avec ses compétences et sa classification. Il est tenu de lui donner une rémunération qui correspond à sa qualification (compétences) et à sa classification (sa position dans la grille salariale). De ce fait, il peut, par exemple, proposer à son salarié de suivre des formations sur de nouvelles technologies afin d’approfondir ou développer ses compétences, de mettre à jour ses dossiers…Le salarié payé normalement reste de ce fait à la disposition de l’employeur.
Toute modification envisagée au contrat de travail doit respecter les dispositions de l’article 8 de la convention collective SYNTEC relative à la modification du contrat de travail. Ainsi, l’article 8-c de la convention collective SYNTEC précise que : « Si par suite de circonstances particulières résultant de la situation du travail dans l’entreprise, le salarié se trouve amené à assumer temporairement, dans les conditions de durée précisées par écrit à l’avance, n’excédant pas six mois, et sans diminution de sa classification, ni diminution de ses appointements, une fonction inférieure à celle qu’il occupe habituellement, le refus de l’intéressé d’accepter cette fonction temporaire équivaut à une démission de sa part. »
La situation d’intercontrat peut parfois conduire certains employeurs à demander à leurs salariés de rester à leur domicile. Cette situation devrait en principe être évitée. Si une telle situation se produit, le salarié devra exiger que l’employeur formalise cette situation par un ordre de mission(article 51 de la convention collective).
– L’intercontrat ne peut justifier un licenciement
Durant la période d’intercontrat, l’employeur peut être tenté si la situation perdure de licencier son salarié. Il importe de respecter les règles relatives aux licenciements.
En tout état de cause, l’intercontrat ne peut justifier un licenciement. En effet, un salarié en intercontrat ne peut être licencié du fait de cette situation. Si un motif économique ou personnel est invoqué, l’employeur doit le justifier et l’étayer.
– Le motif du licenciement invoqué doit être réel et sérieux
– L’employeur peut justifier le licenciement sur le motif économique. Dans cette situation, ce motif doit être justifié au sens de l’article L 1233-1 du code du travail. C’est-à-dire que la société doit justifier des difficultés économiques réelles, de mutations technologiques ou de la nécessité de sauvegarder la compétitivité. De ce fait, il importe de respecter la procédure à savoir les critères d’ordre concernant les salariés et l’obligation de reclassement (article L1233-4 du code du travail). Par ailleurs, dans la lettre de licenciement doit également figurer l’indication relative à la priorité de réembauchage (article L1322-45 du code du travail).
– Concernant le motif personnel, il doit être également justifié et objectif. Le motif doit être réel et sérieux. Une remise en cause par exemple des compétences ou des fautes commises par le salarié doit être justifiée.
En effet, si le motif n’est pas réel et sérieux, l’employeur s’expose à un paiement des dommages et intérêts en faveur du salarié. Le salarié aura donc tout intérêt à contester le licenciement.
– La possibilité pour le salarié de demander la résiliation judiciaire du contrat si la situation perdure
L’employeur doit procurer au salarié le travail convenu lors de l’embauche. Si l’employeur manque à cette obligation de fourniture du travail, le salarié peut demander en justice une résiliation judiciaire du contrat. L’employeur a manqué à son obligation contractuelle. Une telle action ne peut aboutir que si cette violation est avérée que le salarié s’est retrouvé dans une situation telle qu’il ne peut pas travailler. Ainsi, si la situation persiste, le salarié peut demander en justice la résiliation judiciaire du contrat (Cass. soc. 26 sept. 2012, 10- 30852).
La demande est introduite devant le conseil des prud’hommes. Ainsi la cour de cassation a admis dans plusieurs cas que le salarié pouvait justifier la résiliation aux torts de l’employeur (cass. soc. 31 oct. 2006, n°05-41.773).
En définitive, il ressort que la situation de l’intercontrat bien qu’usuelle dans les SSII, peut mener à des conflits quand la situation perdure. Il importe de ce fait de respecter les dispositions relatives au droit du travail et à la convention collective afin d’éviter que la situation ne dégénère en conflit prud’homal.