Précisions sur la motivation de la lettre de licenciement pour motif économique

Lettre de licenciement

Précisions sur la motivation de la lettre de licenciement pour motif économique : l’employeur n’a pas à faire référence à la situation du groupe (Cour de cassation chambre sociale 3 mai 2016, n°15-11.046)

 

L’article L1233-16 du Code du travail précise que la lettre de licenciement économique doit mentionner les raisons économiques, ainsi que leur incidence sur l’emploi.Lettre de licenciement

La loi impose donc à l’employeur en cas de licenciement de préciser les motifs du licenciement. La jurisprudence à travers plusieurs décisions précise que l’énoncé d’un motif imprécis équivaut à une absence de motif (Cass. soc., 16 nov. 1995, no 92-43.641 ; Cass. soc., 7 déc. 1995, no 92-45.329).

La question soumise au juge était donc de préciser les contours de cette motivation.

Lorsque l’entreprise ne fait pas partie d’un groupe, la réalité des difficultés économiques doit s’apprécier au niveau de l’entreprise dans son ensemble et non de l’établissement (Cass. soc., 17 juin 1992, n° 89-42.769).

Lorsque l’entreprise appartient à un groupe, l’existence de difficultés économiques doit s’apprécier au regard du secteur d’activité du groupe auquel appartient l’entreprise concernée (Cass. soc., 5 avr. 1995, n° 93-42.690 ; Cass. soc., 10 févr. 2010, n° 08-45.381 ; Cass. soc., 14 oct. 2015, n° 14-10.145).

La Cour de cassation devait répondre à la question suivante : dans les groupes de sociétés, la lettre de licenciement qui fait état de difficultés doit-elle faire référence à la situation du secteur d’activité du groupe auquel l’entreprise appartient ?

Dans cet arrêt, la cour de cassation précise que la lettre de licenciement qui mentionne les motifs économiques n’a pas à préciser le niveau d’appréciation de la cause économique lorsque l’entreprise appartient à un groupe.

Ce n’est qu’en cas de litige portant sur la cause réelle et sérieuse qu’il devra être en mesure de justifier, devant le juge, du bien-fondé du motif économique dans le périmètre correspondant au secteur d’activité du groupe.

Les faits sont les suivants : un salarié a été engagé le 2 novembre 1998 en qualité de responsable commercial. La Société est mise en liquidation judiciaire en juillet 2007. Elle a fait l’objet  d’une cession partielle à une autre société. Le contrat de travail du salarié a été transféré à la société acquéreuse. Dans le cadre d’un licenciement économique collectif, le salarié a été licencié par lettre du 26 juillet 2011.

La Cour d’appel de Pau a déclaré le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse. La cour d’appel retient que la lettre de licenciement fait exclusivement état des difficultés économiques de la société employeur sans aucune référence à la situation du secteur d’activité du groupe auquel elle appartient et évoque deux motifs économiques contradictoires, les difficultés économiques de l’entreprise et sa réorganisation pour sauvegarder sa compétitivité. L’employeur est donc condamné à payer des dommages et intérêts.

Saisie, la Cour de cassation casse l’arrêt au visa des articles L1233-3 et L1233-6 du Code du travail. Elle estime qu’en vertu du second de ces textes la lettre de licenciement comporte l’énoncé des motifs économiques invoqués par l’employeur. Par ailleurs, cette obligation légale a pour objet de permettre au salarié de connaître les motifs de son licenciement pour pouvoir éventuellement les discuter et de fixer les limites du litige quant aux motifs énoncés.

La Cour de cassation précise par ailleurs que si la lettre de licenciement doit énoncer la cause économique du licenciement telle que prévue par l’article L. 1233-3 du Code du travail et l’incidence matérielle de cette cause économique sur l’emploi ou le contrat de travail du salarié, l’appréciation de l’existence du motif invoqué relève de la discussion devant le juge en cas de litige.