Cass. soc., 18 sept. 2024, n° 22-22.782, B
La Cour de cassation, dans un arrêt du 18 septembre 2024, se prononce sur le rôle du juge prud’homal en cas de litige concernant l’origine professionnelle d’une inaptitude. Si la CPAM a reconnu un accident du travail, cette décision s’impose au juge, qui doit alors vérifier le lien entre cet accident et l’inaptitude, ainsi que la connaissance de ce lien par l’employeur.
1. Les faits
Un salarié (tuyauteur), victime d’un accident du travail reconnu par la CPAM, a été déclaré inapte à son poste. Faute de pouvoir le reclasser, son employeur a obtenu l’autorisation de l’inspection du travail pour le licencier.
Licencié pour inaptitude, le salarié a contesté cette décision devant le conseil de prud’hommes. Il demandait notamment le paiement de l’indemnité spéciale de licenciement et de l’indemnité compensatrice de préavis, prévues en cas de licenciement pour inaptitude.
La cour d’appel a rejeté les demandes du salarié, estimant qu’il n’avait pas prouvé le lien entre son inaptitude et l’accident du travail.
Selon elle, il appartenait au salarié d’apporter cette preuve, indépendamment de la reconnaissance de l’accident par la CPAM. En l’absence de témoin et de preuves matérielles, la cour a considéré qu’un doute subsistait sur la réalité de l’accident, et a donc écarté l’origine professionnelle de l’inaptitude.
La Cour de cassation a censuré la décision de la cour d’appel. Elle rappelle que si l’inaptitude d’un salarié est liée à un accident du travail reconnu par la CPAM, le juge prud’homal doit tenir compte de cette reconnaissance. Il lui revient alors de déterminer si l’inaptitude est bien la conséquence de cet accident et si l’employeur en avait connaissance.
Ainsi, dans cette affaire, la cour d’appel a eu tort d’ignorer la reconnaissance de l’accident du travail par la CPAM et de rejeter les demandes d’indemnisation du salarié. En effet, celui-ci avait droit à l’indemnité spéciale de licenciement et à l’indemnité compensatrice de préavis, puisque son inaptitude était liée à un accident du travail reconnu.
2. Les enseignements : la décision de la CPAM qui reconnaît un accident du travail s’impose au juge prud’homal
La Cour de cassation, dans cet arrêt vient de rappeler les règles relatives à l’inaptitude d’origine professionnelle.
Elle souligne que les protections accordées aux salariés victimes d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle, notamment en matière de reclassement (article L. 1226-10 du Code du travail) et d’indemnisation (article L. 1226-14 du Code du travail), s’appliquent dès lors que l’inaptitude est liée, même partiellement, à cet accident ou à cette maladie.
La Haute juridiction précise également que la reconnaissance d’un accident du travail par la CPAM s’impose au juge prud’homal. Ce dernier ne peut donc pas remettre en cause cette reconnaissance. Son rôle est alors de vérifier l’existence d’un lien de causalité entre l’accident et l’inaptitude, et de s’assurer que l’employeur avait connaissance de l’origine professionnelle de l’inaptitude au moment du licenciement.
En l’espèce, la cour d’appel avait rejeté les demandes d’indemnisation du salarié, estimant qu’il n’avait pas prouvé le lien entre son inaptitude et l’accident du travail reconnu par la CPAM. La Cour de cassation censure cette décision, rappelant que la reconnaissance de l’accident par la CPAM lie le juge prud’homal. Ce dernier aurait dû se prononcer sur le lien de causalité entre l’accident et l’inaptitude, et non rejeter les demandes du salarié au motif qu’il n’avait pas apporté la preuve de l’accident.
Cet arrêt confirme la jurisprudence constante de la Cour de cassation en la matière (voir notamment Cass. soc., 7 mai 2024, n° 22-10.905) et rappelle l’importance de la reconnaissance d’un accident du travail par la CPAM dans le cadre d’un litige relatif à une inaptitude d’origine professionnelle.