Grossesse – maternité – congé maternité et protection de la salariée
A travers un arrêt rendu le 14 septembre 2016 (Cass. soc. 14 septembre 2016, n°15-15943), la cour de cassation précise l’étendue de la protection du congé maternité.
Elle énonce que la période de protection contre la rupture du contrat de travail de quatre semaines suivant le congé de maternité n’est suspendue que par la prise des congés payés suivant immédiatement le congé maternité.
Il convient à cet effet de revenir sur l’étendue de la protection telle qu’elle figure dans le code du travail.
La protection légale du congé maternité
En application de l’article L. 1225-4, alinéa 1, du code du travail, « aucun employeur ne peut rompre le contrat de travail d’une salariée lorsqu’elle est en état de grossesse médicalement constaté et pendant l’intégralité des périodes de suspension du contrat de travail auxquelles elle a droit au titre du congé de maternité, qu’elle use ou non de ce droit, ainsi que pendant les quatre semaines suivant l’expiration de ces périodes ».
Il en résulte qu’à partir du moment où l’employeur est informé de la grossesse, par la salariée ou par tout autre moyen, ce dernier ne peut rompre le contrat de travail que s’il justifie d’une faute grave non liée à la grossesse, ou à l’impossibilité de maintenir le contrat de travail pour un motif étranger à la grossesse ou à l’accouchement.
Depuis l’entrée en vigueur de la loi °2016-1088 du 8 août 2016 dite Loi travail, la période de protection de la salariée qui reprend son travail à l’issue de son congé de maternité est passée de 4 semaines à 10 semaines (article L.1225-4-1 du code du travail).
Il convient d’ailleurs de souligner que cette protection spécifique avait été étendue au père par la loi du 4 août 2014, qui bénéficie désormais également d’une période de protection de 10 semaines à compter de la naissance de son enfant.
En conséquence, si l’employeur prononce un licenciement ou rompt son contrat à durée déterminée de manière anticipée pour un autre motif, il s’expose à la nullité du licenciement (Cass. Soc., 30 avr. 2003, n° 00-44.811; Cass. Soc., 15 oct. 200, n° 01-44.503; Cass. Soc., 12 mai 2004, n° 02-43.261).
La sanction
Lorsque le licenciement est nul, la salariée a droit à une réintégration dans son emploi ou, à défaut, dans un emploi équivalent.
Il en résulte qu’en cas d’annulation du licenciement d’une salariée en état de grossesse en application des dispositions du code du travail, sa réintégration doit être ordonnée si elle le demande. Cette réintégration doit être faite dans son emploi, ou à défaut, dans un emploi équivalent (Cass. soc. 30-4-2003 n° 00-44.811 ; 15-10-2003 n° 01-44.503).
La salariée peut alors prétendre au paiement d’une somme correspondant à la réparation de la totalité du préjudice subi entre son licenciement et sa réintégration ou la date de son refus si elle renonce finalement à la réintégration demandée (Cass. soc. 17-2-2010 n° 08-45.640 , dans la limite du montant des salaires dont elle a été privée (Cass. soc. 30-9-2010 n° 08-44.340).
Une jurisprudence ancienne précise qu’il importe peu que l’intéressée retrouve un emploi, mieux rémunéré, aussitôt après son licenciement: l’employeur doit néanmoins lui verser le salaire qu’elle aurait perçu jusqu’à l’expiration de la période de protection.
Si la salariée ne demande pas sa réintégration, l’employeur doit lui verser une indemnité égale au salaire qu’elle aurait perçu pendant la période couverte par la nullité, c’est-à-dire la période comprise entre la date d’éviction de l’entreprise et l’expiration de la période de protection de 10 semaines.
La salariée bénéficie en outre des indemnités de rupture (indemnité légale ou conventionnelle de licenciement et indemnité de préavis) et d’une indemnité au moins égale à 6 mois de salaire réparant intégralement le préjudice subi du fait du caractère illicite du licenciement (Cass. soc. 17-12-2002 n° 00-44.660 : RJS 3/03 n° 337 ; 15-1-2014 n° 12-24.824 : RJS 3/14 n° 215).
L’arrêt de la Cour de cassation du 14 septembre 2016
Dans l’affaire soumise à la cour de cassation, une salariée a été engagée à compter du 1er juin 2003 en qualité de responsable commercial adjoint.
Elle a été ensuite en congé maternité du 11 décembre 2009 au 6 août 2010. Par lettre du 20 mai 2010, la société lui a fait savoir qu’elle mettait en œuvre un projet de restructuration impliquant la suppression de vingt-six emplois dont le sien, qu’un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) avait été soumis au comité d’entreprise et que figurait en annexe du PSE la liste des postes disponibles proposés en reclassement au sein de l’entreprise et du groupe, que deux postes pouvaient lui convenir et qu’elle disposait d’un délai de quinze jours pour se porter candidate.
Elle a été dispensée d’activité par son employeur à partir du 6 août 2010 avant d’être licenciée le 27 septembre suivant pour motif économique.
La salariée saisit le conseil de prud’hommes pour demander la nullité du licenciement, ainsi qu’une demande de réintégration, un rappel de salaires, ainsi que des dommages et intérêts.
La salariée arguait que le licenciement a été prononcé en violation de la période de protection laquelle avait, selon elle, pour point de départ la fin de la période de dispense d’activité.
La Cour d’appel déboute la salariée de ses demandes.
La Cour de cassation rejette le pourvoi en précisant que « la période de protection de quatre semaines suivant le congé de maternité n’est suspendue que par la prise des congés payés suivant immédiatement le congé de maternité, son point de départ étant alors reporté à la date de reprise du travail par la salariée ». Dès lors, il n’est pas possible de différer cette période pour un motif autre que les congés payés.